Quand je sais que je dois écrire pour un spectacle, je redouble d'attention pour ressentir mes émotions, ne pas me laisser distraire, pour rendre hommage au mieux aux artistes comédiens et/ou musiciens.
Ce soir je suis allée écouter la harpiste Andalouse Ana Crisman et je dois avouer que le temps est passé, vite, très vite.
Même si la salle était comble (190 sièges) même si j'étais sur un strapontin et que mon voisin de devant était assis sur les marches, quasiment adossé à mes jambes, rien de tout ça ne m'a paru pénible, tant j'étais absorbée, happée par ce spectacle généreux et de haute qualité.
Ana Crisman a mis la Harpe au diapason du Flamenco, une création pure de sa part, une invention, une première qui a séduit Luis de la Carrasca lorsqu'il l'a découverte.
J'ai été subjuguée par son adresse, sa pénétrance dans l'univers de cette musique. Les rythmes, les silences, les sons si aigus ou graves, sa harpe se donnait des allures de guitare, de banjo et même de contrebasse par moment.
Je pense que la musique est comme la peinture, il n'y a pas besoin de s'y connaître pour apprécier.
C'est avec mon cœur que je perçois la générosité, la puissance du partage que transmet un artiste, un spectacle.
Celui-ci restera gravé en moi, le premier morceau, Ana Crisman seule sur scène, m'a donné des frissons et des larmes douces de bien être.
Sa musique m'a transportée dans des paysages secs, aux couleurs chaleureuses de soleil, j'ai vu les taureaux paître paisiblement dans les champs, la lumière habitait mon esprit.
J'ai essayé de revenir sans trop m'éloigner de la musique qui me faisait m'évader d'une salle de spectacle avignonnaise.
Le percussionniste Perico Navarro est arrivé en second, puis la danseuse Ana Pérez sublimissime, élégante, puissante dans sa présence sur scène, vêtue de blanc, une longue robe à traîne, une robe de flamenco avec des volants.
J'étais une enfant en la regardant danser et rejeter sa robe d'un coup de jambe précis, elle m'a rappelé les poupées espagnoles avec de magnifiques robes qui trônaient sur le lit de ma grand mère qui avait épousé un bel andalou Antoine Zamora.
La chanteuse Rocio del Corzo est ensuite arrivée et s'est assise pour chanter. Sa magnifique chevelure de part et d'autre de sa poitrine. Ses chansons venues du fond de ses entrailles, j'aurais aimé les comprendre, son visage chantait la douleur et l'amour je crois.
Ces quatre artistes forment un groupe artistique bouleversant et magnétique.
Je les remercie du fond du cœur de m'avoir donné tant de bonheur ce soir.
Je les serre contre moi et je les embrasse tous les quatre.
Je remercie Ana Crisman particulièrement attentive au public et à son équipe, sa générosité et sa bienveillance se lisent dans son regard.
Vendredi 18 mars 2022
Spectacle Arpa Jonda
Théâtre du chien qui fume
Natacha Régnier-Ledieu