Hystéries, de mini tranches de vie pleines de saveurs.
Quand des couples s'exposent ils explosent bien souvent. On pense être dans l'amour, la passion et brutalement pour un mot, juste un mot, rien qu'un mot tout se délite, se fracasse le couple part en éclats, les mots se superposent, se bousculent , se désagrègent enfin ...il ne reste plus rien, chacun va de son côté laissant derrière lui un champ dévasté, comme une plage en fin de soirée.
Dix histoires d'amour qui à un moment donné ont trouvé une faille si infime soit elle mais une faille qui est devenue un gouffre dans lequel leur amour s'est fracassé.
Les scènes sont entrecoupées de chansons dont la vitalité et l'humour nous propulsent ailleurs, loin de la tristesse évoquée. Il faut voir ces chorégraphies décalées pleines d'énergie, cette vitalité contrastant avec les scènes de théatre. C'est un vrai ballon d'air frais, une bulle de fraicheur et de vitalité. On reprend des forces pour affronter la suite.
Mélanie Freymond, Nathan Pannatier et Olivier Giroud ont une énergie peu commune et communicative. On prend plaisir à les voir dans cette marqueterie théâtrale qui dépeint fort bien notre société où les êtres s'accrochent aux mots non pas comme des bouées de sauvetage mais comme des épées pour pourfendre l'autre. Que de situations qui glissent dans le gouffre alors qu'elles auraient pu se rattraper et éviter la catastrophe. On voit le poids des mots leur usage perfide, leur potentiel de destruction qui chaque fois amène à la destruction du couple. En fait toutes les relations sont faites de mots, dans un sens ou dans un autre c'est le mot qui domine et qui fait la relation, c'est assez grave que l'on ne s'appuie que sur les mots car ils sont assez fallacieux il faut le reconnaître.
Beaucoup d'humour et de dérision, c'est millimétré, tonique tout s'enchaine très vite, le décor composé de deux éléments à roulettes se transforme immédiatement, pas un temps mort juste le temps de passer du rire aux larmes.
Bravo à cette équipe Suisse très professionnelle et bourrée de talent. La pièce fut accueillie avec force applaudissements, succès bien mérité.
Jean Michel Gautier
De Alexis Van Stratum
avec Mélanie Freymond, Nathan Pannatier et Olivier Giroud
Les non-dits et les mal-dits, qui n’en connait pas la teneur ? Qui ne les a jamais côtoyés ? Ils sont souvent plus dramatiques que les mots-dits, justement, parce qu’ils n’ont pas ou ont été mal exprimés. Mais qu’il est difficile parfois de parler, en particulier lorsqu’il s’agit de sentiments ! Pour certains, certaines d’entre nous, cela s’avère même impossible.
On s’escrime à se faire comprendre chacun à sa manière, on croit se faire comprendre … Ce n’est pas le cas. Que ne pratique-t-on pas le théâtre ! Nous pourrions tous alors, comme le font ces couples qui se présentent ici devant nous, sur cette scène du Verbe Fou, dans leur homosexualité ou leur bisexualité, - qu’importe, les problèmes pour les uns et les autres sont les mêmes, l’amour ne connait pas le sexe, féminin ou masculin des personnes, - on pourrait de cette manière, faire éclater les bulles d’isolement, exploser les incompréhensions et les silences, éviter l’implosion …
Nul doute qu’en se mettant en scène, dans ces situations personnelles si complexes et compliquées, en étant à la fois acteurs et spectateurs de notre vie à deux, nombre de crises trouveraient une fin plus heureuse, jusque dans la séparation. Mais voilà, ce n’est pas le cas. Ancrés dans nos habitudes, reclus dans nos difficultés et nos problèmes, prisonniers de nos retenues, emportés par nos dérives, nous forçons le drame un jour, à éclater. Inexorablement, irréparablement, terriblement parfois.
Plusieurs situations nous sont présentées dans cette succession de sketches formidablement joués, toutes ou presque plus ou moins appréhendées, une ou deux heureusement évitées. Nous en prenons certaines en pleine figure. Énergie, profondeur,
mpulsions, états d’âme, sentiments, débordements, … hystéries : tout y est, rien ne manque. Ah si ! La flamme ! Celle qui a existé un jour mais qui, pour différentes raisons dont nous nous doutons bien, un jour, s’est vue éteinte, peu à peu, ou subitement.
Les roses rouges de la passion se sont effeuillées puis fanées. Elles auront duré, le temps d’une vie à deux, l’existence d’un couple. C’est souvent ça, l’amour.
Les trois interprètes sont beaux, jeunes et charmants, la Belgique une nouvelle fois théâtralement mise à l'honneur par le texte porté, pays d'origine de l'auteur. Au Verbe fou, le théâtre de Fabienne Govaerts … comment pourrait-il pu en être autrement ! Leur jeu est un enchantement, leurs sketches une suite de situations tragi-comiques, à la frontière de la crise, en crise. Du couple, ils nous révèlent toutes les sensations gustatives possibles et imaginables : de l'acidulé à l'acide, du doux à l'amer, de l'acerbe au piquant.
Les roses rouges symboles de l'amour par leur couleur, de douleur par leurs épines, tracent le fil des situations successives, des moments de tensions les plus compliqués qu'une vie à deux puisse générer, font toucher du doigt l'endroit où ça fait le plus mal, très mal même parfois, à la limite du supportable, voire jusqu'à l'insupportable. Mais ça, c'est dans la vraie vie. Ici, sur cette scène du Verbe fou, les situations les plus complexes, les plus inextricables, sont traitées avec une apparente désinvolture et légèreté qui n'efface en rien le tragique des situations présentées.
C'est un moment mémorable qui vous attend durant lequel le rire n'est pas exclu. Ils sont comédiens plus que chanteurs ou danseurs, et en jouent. Ces temps où danse et chant s'associent aux jeux sont des bulles de gaieté qui dédramatisent le sujet sans l'occulter.
À voir sans conteste durant le prochain Festival Off d'Avignon.
Cath - L' Art de Cath
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